– LE CUL NOIR LIMOUSIN –
DU PORC AUX DEUX ÉCUS… …. À L’ECUSSON NOIR

Ce cochon de souche ibérique s’est établi à l’Ouest du Massif Central il y a plus de 5 siècles. On parle à cette époque de « porc aux deux écus ».
« Véritable garde-manger sur patte, il a maintes fois sauvé la paysannerie limousine de la misère ».

Des origines lointaines

Les premières traces de cette souche de porc de type ibérique présente à l’Ouest du Massif Central remontent aux années 1600. Cette souche est essentiellement utilisée pour aider la population locale très pauvre à subsister.

Ce cochon est alors élevé deux ans en liberté dans la basse-cour et divague dans la forêt limousine pour y glaner quelques vivres. Élevé au milieu des autres animaux de la ferme et des enfants de la famille, le caractère familier est le principal critère de sélection des truies qui ne doivent pas présenter d’agressivité. Des siècles plus tard, après des décennies d’élevage, on retrouve ce caractère doux très présent sur les animaux de la race.

L’histoire du Cul Noir proche de l’Histoire de France

L’essor de cette souche autochtone de porcs est essentiellement due aux accords entre l’Angleterre et la France au 18ème siècle qui imposent notamment la fermeture des forges du Limousin, principal armateur de l’armée de France. La population limousine se retrouve alors dépourvue de ressources et se tourne vers ce cochon peu exigeant et facile à élever. Véritable garde-manger sur patte, il a maintes fois sauvé la paysannerie limousine de la misère. En plus de sauver de la famine les limousins, la qualité de sa viande et de son lard a vite intéressé les commerçants qui ont développé des circuits vers Bordeaux. Les porcs partaient alors à la marche du Limousin pour rejoindre Bordeaux. Tout au long du parcours, on entendait alors les enfants railleurs chanter « les culs sont noirs, les culs sont noirs ». Les porcs étaient alors abattus à Bordeaux, la viande vendue à la bourgeoisie locale et le lard embarqué sur les navires au départ pour les Indes ou les Amériques.

Fin 19ème début 20ème siècle, l’apogée du porc de race limousine et la naissance du berceau de la race

Ce n’est qu’à la fin du 19ème siècle, de 1893 à 1894 précisément, que le Comice Agricole de Saint-Yrieix-la-Perche (87) s’est penché sur la constitution d’un livre généalogique pour ce que l’on appelle désormais « la race limousine ».

Au début du 20ème siècle, c’est l’essor du chemin de fer qui va permettre un développement rapide du circuit commercial entre Saint-Yrieix-la-Perche, principale ville de foire du porc limousin, et Bordeaux. Ceci va permettre au Limousin de devenir la première région productrice de porc en France avec 130 000 porcs de race Limousine recensés dans la région. Cet avènement se traduit par l’organisation du 1er concours de la race porcine limousine à Saint-Yrieix-la-Perche les 1er et 2 septembre 1906. Fortement implanté autour de ce berceau de Saint-Yrieix-la-Perche, ce cochon se voit entre les deux guerres, rebaptisé « porc de Saint Yrieix ».

Exode rural, Loi de modernisation de l’agriculture : Le glas des races locales

La seconde guerre mondiale voit la fermeture de l’ensemble des livres généalogiques et ceux des races porcines ne seront pas rouvert à l’issu de celle-ci. L’exode rural qui suit la seconde guerre et l’accroissement de la population citadine sonnent le glas de l’agriculture ancestrale pour laisser place au progrès.

Pour le cochon, ce progrès consiste à rentrer les animaux en bâtiments, utiliser des souches plus prolifiques et à croissance plus rapide. Le porc de Saint-Yrieix est alors sur le déclin. La mise en application de la loi sur l’élevage de 1966 va même viser à l’extermination de ces souches locales de porcs en interdisant aux éleveurs de porcs la détention d’animaux non référencés. Le livre généalogique n’étant plus ouvert, le porc de Saint-Yrieix devient une souche interdite. Avec le déclin de cette production ancestrale, la race bénéficie alors d’une forte image de sympathie dans son berceau et les gens commencent à appeler affectueusement ce cochon « le Cul Noir ». Ce n’est que par la ténacité de quelques irréductibles éleveurs à la fin des années 1970 que 3 verrats ont pu être sauvés.

Sauver les derniers représentants de la race, un véritable acte de résistance

En effet, après la mise en application de la Loi de 1966, la souche d’animaux s’est rapidement réduite pour arriver à une cinquantaine d’individus à la fin des années 1970. La race n’étant plus reconnue, les verratiers n’ont pas le droit de détenir d’animaux de cette souche.

Sans la ténacité de deux verratiers et quelques éleveurs autour de Ségur le Château (19) ; Saint Yrieix la Perche (87) et Lanouaille (24), il ne resterait plus d’animaux de cette race à ce jour. En effet, l’extinction a été très proche en 1979 puisque Monsieur ROQUES, verratier à Ségur le Château était détenteur de deux mâles de souche Cul Noir non déclarés. Son beau-frère, gendarme à la brigade de Saint Yrieix la Perche, a eu écho d’un contrôle de la gendarmerie chez les verratiers le lendemain. Il prévient alors Monsieur ROQUES, qui, avec son collègue verratier, vont déménager les 3 derniers verrats Cul Noir au beau milieu des bois en pleine nuit pour éliminer toute trace de cette souche dans les élevages des 2 verratiers. Sans ce véritable acte de résistance, les trois derniers mâles de la race auraient été abattus et la souche perdue. L’histoire ne reste pas sans suite puisque aujourd’hui, c’est au tour de Raymonde CHAUFFAILLE, fille de Monsieur ROQUES, de transmettre son élevage de cochons Cul Noir Limousin à son fils pour perpétuer la tradition familiale.

Le Cul Noir, un Patrimoine Limousin à sauver

1981, année du patrimoine en France ! Chaque Ministère est alors chargé de recenser son patrimoine.  Pour le Ministère de l’Agriculture, ce sera le recensement du patrimoine vivant. Ce recensement permet de retrouver une cinquantaine d’individus de souche « Cul Noir ». Commence alors un long travail de conservation et de relance de cette souche. En 1993, le syndicat des éleveurs de porcs Cul Noir est créé et, finalement ce n’est que le 5 novembre 1997 que le Ministère de l’Agriculture reconnait officiellement la race Cul Noir Limousin. Dès 1998, la race peut tenir son 1er concours général au Salon de l’Agriculture. Les effectifs augmentent à nouveau et le produit « Cul Noir Limousin » revient un peu au goût du jour.

L’écusson Noir, une évidence

Fort d’un long travail de sauvegarde et de développement de la production sans dénaturer la qualité exceptionnelle du Cul Noir Limousin, les éleveurs ont choisi de se regrouper au sein de la Coopérative du Cul Noir. Ils mettent ainsi en commun leurs savoirs et leurs productions pour développer une filière dédiée à la mise en marché du Cul Noir Limousin.

Mais quel nom choisir pour cette nouvelle filière ? Une évidence… « L’ECUSSON NOIR ».